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Titre: Histoire d'Albert Auteur: Töpffer, Rodolphe (1799-1846) Date de la première publication: 1845 Lieu et date de l'édition utilisée comme modèle pour ce livre électronique: Genève: J. Kefsmann; Leipzig: Bernhard Hermann, 1846 [«2me Edition»] Date de la première publication sur Project Gutenberg Canada: 23 janvier 2013 Date de la dernière mise à jour: 23 janvier 2013 Livre électronique de Project Gutenberg Canada no 1037 Ce livre électronique a été créé par Rénald Lévesque à partir d'images généreusement fournies par Google Books NOTE DU TRANSCRIPTEUR: Les légendes de cet ouvrage sont écrites en Français et en Allemand. Le transcripteur admet son ignorance de la langue allemande et a préféré ne pas retranscrire les légendes allemandes, plutôt que de donner une transcription farcie d'erreurs. [Illustration 2 HISTOIRE D'ALBERT par R. Toepffer GENÈVE 1846 Librairie allemande de J. Kefsmann, rue du Rhône, 171.] [Illustration: 7 Ouvrages autographiés du même auteur qui se trouvent chez tous les libraires et marchands d'estampes d'Allemagne, d'Autriche, de Russie, Hollande, Danemark, Suède, etc. Histoire de Monsieur Jabot. Histoire de Monsieur Crépin Histoire de Monsieur Pencil. Histoire du Docteur Festus. Histoire de Monsieur Albert Histoire de Monsieur Vieux Bois. Chaque volume à rc 1.15 Sgr de Prusse 6 francs de France.] [Illustration 8 HISTOIRE D'ALBERT PAR R. TOEPFFER. 2me Edition 1846 Genève Librairie allemande de J. Kefsmann Rue du Rhône, 171. Leipzig. Bernhard Hermann. Lithographie de Mr. Bodé à Reutlingen.] [Illustration 10 Préface. Ci-contre, et rien qu'à tourner les pages, l'on verra figurée au naturel toute l'histoire d'Albert, et comme quoi, n'étant bon à rien, il finit par trouver sa vocation. Va, petit livre, et choisis ton monde, car, aux choses folles, qui ne rit pas baille; qui ne se livre pas résiste; qui raisonne se méprend; et qui veut rester grave, en est maître. Vers l'âge de douze ans, Albert est mis au collège où il continue d'occuper le dernier banc. Ce qui est cause que son père le morigine.] [Illustration 11 et que sa mère le réconforte. Comme le concours approche, Albert s'y prépare. Et son père veille à ce qu'il ne s'endorme pas.] [Illustration 12. Par malheur, le jour du concours, Albert s'oublie devant une ménagerie. Ce qui est cause que son père le morigine, et que sa mère le réconforte. Le collège terminé, on délibère sur la carrière d'Albert qui insiste pour poursuivre celle des études, parce que, au collège, ce qui l'ennuyait, c'étaient les éléments.] [Illustration 13. On cède au voeu d'Albert qui est habillé en étudiant. Pour l'encourager son père lui fait présent d'une badine, et sa mère d'un pantalon à sous-pieds. En attendant l'ouverture des cours Albert déclame du Hugo. Ce qui frappe Albert dans son Hugo, ce sont le préfaces, à cause des doctrines. A partir ce jour, Albert comprend pourquoi les éléments l'ont tant ennuyé; c'est qu'il lui fallait des doctrines! Les cours académiques s'ouvrent enfin et Albert écoute avec avidité.] [Illustration 14. Il est enchanté des figures géométriques, et, rentré chez lui, il en construit à plaisir. Il est enchanté de la chimie, et, rentré chez lui, il boit savamment un composé d'oxygène et d'hydrogène appelé vulgairement, eau claire. Il est enchanté de la physique, et, rentré chez lui, il défait le baromètre, pour le refaire meilleur. Ce qui est cause que le baromètre ne bougeant plus de Tempête, le père d'Albert s'abstient de toute partie de plaisir.] [Illustration 15. Alors Albert lui explique que ce qui fait que le Baromètre est bas c'est l'extrême pesanteur de l'air. Albert explique à la servante que ce qui produit l'ébullition, c'est l'extrême chaleur du feu. Albert explique aussi à sa mère que ce qu'elle admire là, ce sont des céphalées, et que ce qu'elle a sous le yeux, c'est un arc soustendu. [Illustration 16. Cependant à mesure que les constructions géométriques vont se compliquant davantage, Albert en est insensiblement moins épris. Ce qui fait que son père est insensiblement moins content de lui. Et que sa mère le réconforte. A mesure aussi que la chimie s'éloigne de l'eau claire, Albert y met moins d'intérêt. [Illustration 17. Ce que sa mère comprend jusqu'à un certain point, mais pas du tout son père. A mesure aussi que les autre sciences tournent davantage aux notions positives, Albert s'en occupe avec moins d'ardeur. Ce que sa mère s'explique un peu par des suites de petite vérole.] [Illustration 18 Mais son père pas du tout. Albert fait de sérieuses réflexions. Cependant on lui permet de faire son droit, parce que, au fond, ce qui l'ennuyait en philosophie, c'étaient les notions positives. Ce qui enchante surtout Albert, se sont les origines du droit naturel, parce qu'elles se perdent dans la nuit des temps. Mais à mesure que l'on s'éloigne de la nuit des temps, Albert se désenchante du droit naturel.] [Illustration 19. Malgré le droit naturel, Albert est arrêté comme n'ayant pas de permis de chasse. Et à cause du droit naturel, son père lui administre une correction quelque part. Forcé de retourner aux cours, Albert y porte son Hugo et il s'y repaît de Djinus, de néant, de mort, d'océans et de doctrines. Mais le droit n'en va pas mieux, en sorte que Albert s'essaie à peindre en vers le vide intime de son âme. La tombe qui ouvre à sa jeunesse décolorée une gueule séduisante. [Illustration 20. Son âme, que tord le doute! et que détord l'espérance; son génie à qui les institutions refusent de l'air et de l'espace; la critique, immonde vampire du génie de son aurore. Surpris par sa mère, Albert lui lit l'ode sur sa tombe, et cette bonne dame trouve si beau, mais tant triste. [Illustration 21. Surpris par son père, Albert est sur le point de renoncer à la poésie. Se souvenant néanmoins que tous les grands poètes naissants ont été contrariés par leur père, Albert reprend courage. Et il donne suite à son projet d'adresser ses odes à Mr. La Bartine en lui marquant le désir d'avoir son avis avant de courir les chances d'une publicité précoce. Vos vers, Monsieur, sont venus faire une agréable diversion aux préoccupations politiques qui me poursuivent jusques dans ma retraite de Cinq Points. Tout ce que je puis vous en dire, ce qu'ils m'ont plu infiniment et que je m'estimerais heureux de les avoir faits. Poursuivez, Monsieur cette noble carrière: c'est désormais à la poésie de compléter la destinée de l'humanité. Agréez, etc.] [Illustration 22. Enchanté de cette réponse, Albert fait imprimer ses Odes avec la lettre pour préface et son portrait en tête. Ce livre est lancé sous le titre de Harmonies orageuses et Albert ne s'occupe plus que de ressembler à son portrait. Les gens lisent l'affiche et Albert jouit de sa célébrité naissante. Retourné aux études, Albert écoute avec gravité, mais il trouve la matière bien peu approfondie et son professeur bien peu célèbre.] [Illustration 23. Cependant le livre ne se vendant pas l'imprimeur a l'idée d'adresser sa note au père. Ah! tu aimes les harmonies orageuses!!... Se trouvant décidément trop contrarié dans sa vocation, Albert renonce pour tout de bon à la poésie. Et étant retourné aux Cours, il s'y tient debout les premiers jours.] [Illustration 24. Mais le droit civil ne laisse pas que de l'attirer bien peu. A l'estaminet, Albert se lie avec le Carbonaro Mangini qui lui explique le plan central du grand comité secret. Albert assiste rien que pour voir à une séance du comité local. Après quoi, renonçant à ressembler à son portrait, Albert ne s'occupe plus que de se laisser croître une moustache et un collier.] [Illustration 25. A mesure que son collier croît, Albert recouvre insensiblement toute sa dignité de l'homme, et il ne voit plus dans les fonctionnaires civils que les horribles exploitateurs du peuple; dans les fonctionnaires de l'ordre militaire, que les abjects supports de la tyrannie organisée; dans les Curés, que les abrutisseurs du peuple et la valetaille du trône;] [Illustration 26 dans les sacristains et dans les Suisses d'église; que des créatures dégradées, honte à la fois et vermine d'un état social absurde. Qu'un sang impur..., Abreuve nos sillons..., Abreuve nos sillons!!] [Illustration 27. Dans la séance suivante du comité local, Albert jure haine aux Rois, reconstitution de la Pologne, affranchissement de l'Italie, émancipation du Nord, et, généralement parlant tout ce qui fera des cinq parties du monde une seule famille gouvernée par la liberté, unie par l'égalité, heureuse par la vertu. Albert s'ouvre à sa mère au sujet de son initiation et lui révèle les projets du comité local sur les cinq parties du monde. Cette bonne dame trouve tant beau, mais si difficile. Albert ne s'ouvre pas à son père, parce que celui-ci trouve que le droit ne va déjà pas très bien. Albert trouve sa dignité de l'homme un peu compromise et il hésite à s'occuper davantage de l'avenir des cinq parties du monde.] [Illustration 28. Aussi, étant retourné aux cours, il mord ferme au droit constitutionnel. Mais quand le Professeur en est venu à l'absurdité d'une royauté possible, et d'un représentatif applicable, il tousse d'indignation et il quitte brusquement la salle. Cependant, au dehors, de l'agitation se manifeste, et le comité local se constitue en permanence. Des masses s'ébranlent dans une petite rue. Albert court s'aviner en toute hâte, et il rejoint les masses au moment où elles vont surprendre le poste.] [Illustration 29. Pendant qu'on surprend le poste, le comité local fait afficher dans une petite rue le gouvernement provisoire. Le poste ayant riposté vivement, les masses se retranchent dans une petite maison d'une petite rue. L'avenir des cinq parties du monde est manqué, et des arrestations s'opèrent. Pendant que les arrestations s'opèrent, Albert s'efforce plus que jamais de ressembler à son portrait. Toutefois, averti que les papiers du comité local sont tombés au pouvoir de la police, Albert déménage.] [Illustration 30. N'ayant tout à l'heure plus le sou, Albert entre comme aide chez un chirurgien dentiste. Mais s'ennuyant bientôt de l'état de chirurgien dentiste, Albert entre comme aide, chez un extirpeur de cors et durillons.] [Illustration 31. Au bout d'un mois, Albert quitte son maître et extirpe pour son compte. Par malheur, tous ses sujets étant venus à mourir du tétanos, Albert déménage. Entré chez un négociant propriétaire à Bordeaux, Albert y tatille furtivement les vins, pour s'instruire. Ayant fait de rapides progrès, Albert devient commis-voyageur en vins, et il assassine d'étage en étage.] [Illustration 32. Au rez de chaussée, à l'entre sol, au premier, au deuxième, au troisième, au 4ème, au 5e, au 6e, au 7e, 8e, 9e. Au bout d'un an Albert s'établit pour son compte.] [Illustration 33. Ayant appris qu'Albert est établi à Bordeaux, Mangini, Pacini et Carabini viennent l'y voir, et ils se plaisent à boire à sa santé. Et aussi à la santé de la liberté! de l'Égalité!!!! de la fraternité!!!! de la vérité!!!! de la haine des tyrans!!!! des fonctionnaires!!!! du clergé!!!! de la presse soudoyée!!!! de l'autocratie!!!! de Rothchild!!!! de Metternich!!!! Metternich!!!! de..... etc., de..... etc., de..... etc., de..... etc. [Illustration34. Par malheur, la faillite est déclarée; et Jaques déménage. Entré chez un Editeur libraire, Albert est chargé du placement de la grande édition de la Métaphysique pittoresque, texte et gravures, en sorte qu'il recommence à assassiner d'étage en étage. Au rez-de-chaussée, au premier, au 2ème, au 3ème, au 4ème.] [Illustration 35. Au troisième de la maison voisine, Albert insiste pour être introduit, et il fait antichambre pendant qu'on va prévenir monsieur. Monsieur dont l'épouse est sur le point d'accoucher déplore qu'on lui fasse des visites dans un moment pareil. Au premier mot de métaphysique pittoresque, monsieur entre en grande fureur. Albert ayant reçu plusieurs contusions se dégoûte de l'état et il déménage.] [Illustration 36. Entré chez un épicier, Albert y trouve toute l'édition de ses harmonies orageuses mise en cornets. Et tant de poésie inspirant le dégoût du poivre et de la cannelle, il méprise son état et forme des rêves de gloire. Ayant traité son patron d'homme vulgaire, Albert est dans le cas de déménager. En route, Albert achète pour trois francs cinquante centimes, le secret de la méthode d'Aubuisson par laquelle on enseigne l'histoire universelle en quatre leçons. [Illustration 37. Albert fait de jolies affaires parce que tous les sots ont pour lui. Par malheur, la méthode n'ayant pas réussi, Albert déménage en toute hâte. Ayant gagné une jolie somme avec la méthode d'Aubuisson, Albert achète un secret pour fabriquer le chocolat sans cacao, et il active la fabrication par sa présence. La fabrication avance et Albert calcule à un franc le kilo un bénéfice net de cent cinquante mille francs. La fabrication avance et Albert fait tenir prêts des ballots pour les cinq parties du monde.] [Illustration 38. Par malheur le chocolat se trouve avoir le goût de Guano, et la consistance de la craie de Briançon. La faillite est déclarée et Albert déménage. Dégoûté du commerce, Albert entre comme instituteur chez le Comte Baldaquin. Mais le Comte lui explique qu'il veut pour ses enfants point du tout de physique de droit naturel ni de doctrine, et, au contraire, beaucoup d'orthographe et d'arithmétique.] [Illustration 39. Dès le lendemain, Albert met les enfants à l'arithmétique, mais cela ne va plus du tout, parce qu'alors il se trouve que les petits Baldaquin l'ont déjà poussée plus loin que lui. Au bout d'un mois le comte remercie Albert de ses soins. En chemin, Albert rencontre Simon de Nantua qui l'interroge, apprend son histoire et lui dit: Un seul des métiers que vous avez essayés pouvait vous faire vivre honorablement, mais il fallait l'apprendre et s'y tenir. Venez avec moi, je vous placerai, et si vous faites bon commencement, vous ferez bonne fin. Albert est placé par Simon de Nantua chez un fabricant de bougies, et il fait un bon commencement. Au bout de six mois Albert passe des mèches à la tremperie.] [Illustration 40. Au bout de six autres mois, Albert passe de la tremperie à aider la bourgeoise pour la vente. Au bout de six autres mois le bourgeois étant mort, Albert se trouve être à la tête de l'établissement et tout en se promenant dans le comptoir, il médite de donner une grand extension à la fabrication. Il y a même des moments où il calcule un bénéfice net de cinquante mille francs. Albert tout à la fois active la fabrication, achète un secret pour tirer de la cire des os de chevaux et prépare des ballots pour les cinq parties du monde. Au bout de trois mois, la faillite est déclarée et Albert déménage.] [Illustration 41. Albert se fait agent d'affaires. L'état irait encore n'était la comptabilité, où Albert n'entend rien. N'en pouvant plus de comptabilité manquée, Albert plante là son bureau et déménage.] [Illustration 42. En arrivant à Roanne au crépuscule, Albert est bien étonné de voir Mangini, Pacini et Carabini qui allument les réverbères au gaz. L'on va faire un tour, et Albert en apprend de fameuses sur l'état des choses, sur l'organisation nouvelle et sur le prochain triomphe de la liberté, de l'égalité et de la vertu. Sur ce que le Comité central place tous les affiliés dans les allumeurs pour être maître des réverbères.] [Illustration 43. Sur ce que le mouvement n'éclatera que quand l'éclairage au gaz aura été établi dans toutes les préfectures et les sous-préfectures. Sur ce qu'il doit lui-même s'inscrire dès ce soir pour la première place vacante d'allumeur. Présenté au Comité local, Albert expose qu'il a vu partout le travailleur obligé de déménager devant l'obstacle d'institutions bâtardes, de lois absurdes et de capitalistes égoïstes, que lui-même est une victime ambulante de l'ordre social, et que partout l'air et l'espace ont manqué à sa vertu. Pendant quatre mois, Albert allume les réverbères au gaz à Roanne. Mais la Police ayant surpris les allumeurs réunis en corps délibérants, Albert et les trois amis parviennent à déménager. Et en passant le Cerdon, ils s'y nourrissent de fruits sauvages.] [Illustration 44. Arrivés sur le sol Helvétique, les quatre amis saluent avec ivresse cette terre de liberté. Et entrés dans le chef-lieu, ils fraternisent avec les publicistes de l'endroit.] [Illustration 45. L'on va faire un tour, et les quatres amis ont bientôt appris des publicistes de l'endroit que le Canton gémit sous le joug sans nom d'une aristocratie échevelée. Que le gouvernement y est la proie d'hommes personnellement doux et habiles, mais politiquement astucieux et incorrigibles. Que le peuple y est heureux et libre, mais ne se comprenant pas et n'étant pas compris. Qu'en conséquence le moment est venu d'apprendre au peuple à se comprendre et à être compris. Secondé par les amis politiques et par les publicistes de l'endroit, Albert fonde un journal.] [Illustration 46. Le premier Nº fait plaisir. Organe modéré, dit-il, de toutes les idées utiles, de tous les désirs légitimes, de tous les progrès graduels, notre feuille subsistera par le concours de toutes les opinions généreuses, de tous les esprits sages, et de tous le coeurs dévoués. Par malheur, ni les opinions généreuses, ni les esprits sages, ni les coeurs dévoués ne s'abonnent, en sorte qu'Albert dîne tous les jours tristement d'un potage maigre qu'on lui fournit à crédit. Mais le 10e Nº déclare hautement que le malaise de l'industrie tient à l'organisation politique du pays et à l'inconstitutionnalité de la Constitution. Tous les industriels qui éprouve du malaise s'abonnent. Le Nº 20 démontre que toutes les places sont conférées à la stupidité complaisante, au détriment des hommes de mérite indépendants. Tous les gens sans place s'abonnent. Le 30e Nº démontre que s'il y a des batteurs de pavé, c'est uniquement parce que les capitalistes s'obstinent à ne leur point faire d'avances. Tous les batteurs de pavé s'abonnent. Le 40e déplore les rigueurs de l'opinion envers les banque-routiers qui ne sont en définitive que les victimes malheureuses d'une détestable organisation de crédit. Tous les banque-routiers s'abonnent.] [Illustration 47. Le 50e Nº attaque les pouvoirs, persifle les fonctionnaire, et raille les sous-officiers. Tous le caporaux s'abonnent. Le 50e Nº vaut à Albert des témoignages qui lui rappellent bien vivement la maison paternelle. Néanmoins Albert trouve l'état bon; et la Suisse un vrai pays de ribote pour les publicistes, en sorte qu'il ne déjeune plus que d'huîtres et de côtelettes payées comptant. Le 60e Nº attaque avec violence les puissances étrangères. Tous les réfugiés s'abonnent. Le 70e Nº déplore la mauvaise organisation du travail, et il s'apitoie sur le sort d'un peuple vertueux, qui est livré sans garantie à l'exploitation d'une minorité de capitalistes avides.] [Illustration 48. Qu'un sang impur... Abreuve nos sillons! Abreuve nos sillons! Le Nº 80 conjure le pouvoir d'accorder au peuple ses justes demandes. Le Nº 90 conjure le peuple de s'apaiser, puisque le pouvoir ne saurait lui refuser plus longtemps ses justes demandes. Cependant le peuple commençant à se comprendre et à être compris, il s'ensuit que les citoyens se tirent les uns contre les autres, que la Constitution est culbutée, que la ville est en deuil, que les affaires sont ruinées.] [Illustration 49. Mais Albert a trouvé une existence.] FIN [Fin de Histoire d'Albert, par Rodolphe Töpffer]